La semaine dernière, l’ex-président américain Donald Trump a marqué l’histoire en remportant un second mandat non consécutif à la présidence des États-Unis, devenant ainsi le deuxième président américain après Grover Cleveland à réussir un tel retour en politique. Cette victoire a immédiatement soulevé de nombreuses interrogations, notamment sur les conséquences qu’elle pourrait avoir pour le Cameroun, qui entretient des relations complexes avec les États-Unis.
Si beaucoup restent sceptiques face à ce nouveau chapitre de la politique américaine, il est possible de tirer certaines conclusions à partir des éléments de son premier mandat. Quels sont les principaux domaines susceptibles d’être affectés par ce retour de Trump à la Maison Blanche ?
Relations commerciales et économie
L’un des changements majeurs du premier mandat de Trump a été l’annonce d’une exclusion du Cameroun de l’African Growth and Opportunity Act (AGOA) en 2020. Ce programme permettait aux pays africains d’exporter leurs produits vers les États-Unis sans droits de douane. La décision de Trump était en grande partie motivée par la répression violente des insurgés anglophones dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun.
Bien que le gouvernement camerounais ait tenté de réintégrer le programme sous l’administration Biden, un second mandat de Trump ne semble pas prometteur pour la levée de cette interdiction, étant donné que l’administration Trump continue de privilégier les intérêts économiques internes et la « grandeur de l’Amérique ».
Financement du PEPFAR
Le Programme d’Urgence du Président des États-Unis pour la Lutte contre le SIDA (PEPFAR) a été un pilier de la coopération sanitaire entre les États-Unis et le Cameroun, fournissant des traitements gratuits aux personnes vivant avec le VIH.
Cependant, dans un contexte de politique « America First », il est probable que Trump réduise ou mette fin à ces financements. Cela pourrait avoir des conséquences dramatiques sur les milliers de Camerounais qui bénéficient actuellement de ces traitements vitaux.
Actions climatiques : un recul dangereux ?
Donald Trump est bien connu pour ses positions climato-sceptiques. Il a quitté l’Accord de Paris sur le climat en 2017 et a régulièrement minimisé les risques du changement climatique. Pour les activistes camerounais, comme l’ex-journaliste Eugène Nforngwa, la réélection de Trump représente une menace pour les avancées climatiques mondiales.
Le Cameroun, déjà confronté à des phénomènes climatiques extrêmes, pourrait voir ses efforts de lutte contre le changement climatique affaiblis si l’approche « America First » de Trump prend le dessus sur l’engagement international en faveur de l’environnement.
Immigration : un resserrement attendu
La question de l’immigration a été au cœur de la campagne de Trump. Sous son mandat, les règles d’immigration se sont considérablement durcies, et un second mandat pourrait signifier des restrictions encore plus sévères, notamment pour les ressortissants africains.
Le programme de visas de diversité, qui permet à de nombreux Camerounais d’immigrer aux États-Unis, pourrait être réduit ou modifié pour limiter les flux migratoires. Cela pourrait affecter les opportunités pour les jeunes Camerounais cherchant une meilleure vie en Amérique.
La lutte contre le terrorisme : une priorité avant les droits de l’Homme
Trump pourrait également poursuivre sa politique de soutien à la lutte contre le terrorisme, avec un accent particulier sur les groupes comme Boko Haram. Toutefois, cela pourrait se faire au détriment de la prise en compte des droits humains, notamment en ce qui concerne la gestion du conflit dans les régions anglophones du Cameroun.
Sous Trump, les États-Unis pourraient continuer de fournir de l’aide militaire au Cameroun, mais avec peu de préoccupations pour la gestion des droits des détenus ou des violations liées à la répression du conflit interne.
La politique vis-à-vis du Cameroun : Un soutien tacite à Biya ?
Un autre point intéressant réside dans les relations bilatérales entre le Cameroun et les États-Unis sous un second mandat de Trump. L’administration Trump a souvent été perçue comme moins préoccupée par les questions de démocratie et de droits de l’homme, ce qui pourrait profiter à Paul Biya, le président camerounais en place depuis 42 ans.
Si Trump se concentre sur ses priorités internes, il est probable qu’il minimise les critiques à l’égard du régime autoritaire de Biya et continue à fournir un soutien tactique en matière de lutte contre le terrorisme, tout en négligeant les pressions sur la gouvernance démocratique au Cameroun.
Un futur incertain mais continu
En somme, un second mandat de Trump pourrait renforcer les relations entre les deux pays dans certains domaines comme la lutte contre le terrorisme, mais dans d’autres, notamment la santé, l’immigration et l’action climatique, les impacts seraient probablement négatifs pour le Cameroun. Le pays pourrait se retrouver dans une situation où la politique intérieure américaine détermine largement ses relations internationales, avec peu de place pour les préoccupations liées aux droits humains et à la gouvernance démocratique.
À l’approche des élections présidentielles de 2025, alors que Paul Biya pourrait briguer un nouveau mandat à 92 ans, le Cameroun semble prêt à naviguer les défis d’un monde de plus en plus polarisé, sous un président américain qui privilégiera avant tout les intérêts nationaux.