Fin de combat pour la liberté d’expression pour Suzanne Kala Lobe. Le public ne vivra plus jamais de coups de gueules de l’ancienne éditorialiste de La Nouvelle Expression et consultante de Droit de réponse sur Equinoxe TV. La journaliste émérite est morte la nuit dernière des suites de maladie. L’information a réveillé le monde de la presse au Cameroun. Les réseaux sociaux en ont fait leurs choux gras.
Et du coup, c’est une pluie de réactions en hommage. David Nouwou, rédacteur-en-chef de La Nouvelle Expression, journal dans lequel l’ancienne éditorialiste a passé plus d’une dizaine d’années, garde de la défunte « très opiniâtre. Quand elle voulait faire quelque chose, elle tenait absolument à le faire jusqu’au bout ». Christophe Bobiokono connaît davantage la femme : « C’était quelqu’un qui polémiquait à longueur de journée, avec des opinions qui variaient tous les jours et savait toujours mobiliser ses arguments pour défendre ses points de vue dans chacune des postures qu’elle avait », déclare-t-il, convoquant l’émission Polémos que présentait Suzanne Kala Lobe sur Radio Equinoxe, de sa « très belle voix radiophonique » qu’il salue.
«Sur les traces de son père»
Mais l’homme ne peint pas une obstinée de la polémique : «Elle aimait prendre le contrepied de l’opinion courante, et c’est ce qui la caractérisait. Elle avait beaucoup de talents », précise celui qui a côtoyé Suzanne Kala Lobe dans le cadre de Polémos, mais beaucoup plus au Conseil national de la communication (CNC). Et de fait, les deux journalistes ont fait partie de la première cuvée de membres du CNC reformé. Le directeur de publication de Kalara est d’autant plus estomaqué que « de nous tous qui avons été de cette vague, elle était celle qui donnait le plus de ses nouvelles à tout le monde », renseigne-t-il. Pour insinuer que « dans des circonstances normales, elle nous aurait informés de sa maladie ».
Née le 16 janvier 1953 à Douala, Suzanne Kala Lobé est moulée à l’école de l’Union des populations du Cameroun (UPC), qui contribue à bâtir la forte personnalité de cette intellectuelle avisée des questions politiques et littéraires. La fille d’Iwiyè Kala-Lobè (décédé en 1991, Ndlr) suit les pas de son géniteur, fondateur de la prestigieuse revue Présence Africaine, et rejoint la rédaction de La Nouvelle Expression en 1992. Elle y connaitra une ascension fulgurante, pour finir éditorialiste. Au soir de sa carrière, Suzanne Kala Lobe embrasse l’audiovisuel et se fait remarquer dans plusieurs émissions au début des années 2000, et anime des émissions sur Radio Equinoxe telles que telles que Polémos, Livres noirs, et Musique d’Afrique. Et se fait remarquer en télévision à travers l’émission Vendredi soir sur Equinoxe TV. Avant de créer sa propre structure de production baptisée EBK Productions. Boite qui produit le magazine « Actu » diffusé sur la chaîne Canal 2 International. Lorsqu’elle abandonne ce couloir médiatique, Suzanne Kala Lobe rejoint l’entreprise Hysacam où elle officie à la cellule de communication. Un retrait progressif de l’espace médiatique public, jusqu’à sa disparition ce 1er août 2024, à 71 ans.